FEUILLES VOLANTES
L’inventaire inachevé de Heinrich Buchecker
de
Sylvain HUGEL
Musées de Strasbourg, 17x24cm, 128p., illus., broché, 20€
Conception graphique : Hans GREMMEN
Heinrich Buchecker, entomologiste allemand du XIXᵉ siècle, a consacré sa vie à inventorier le monde des insectes à travers une œuvre dessinée de sa main : une encyclopédie illustrée rassemblant plusieurs milliers d’espèces observées dans les plus grandes collections européennes. Détourné d’une carrière médicale par peur du scalpel, il devient d’abord professeur de cithare puis chef de musique à la cour du roi du Danemark et du roi de Hanovre, avant de se tourner vers l’entomologie vers 1860.
Durant plus de trente ans, Buchecker parcourt l’Europe et produit, seul, près de 5 500 planches représentant environ 60 000 insectes – libellules, papillons, coléoptères… – dessinés à la plume, colorisés à la gouache, souvent sur de modestes feuilles volantes. Entre 1880 et 1884, il est chargé du classement de la collection de James Rothschild, puis rejoint en 1889 le musée d’histoire naturelle de Strasbourg, alors rattaché à l’université allemande, comme assistant en entomologie. Il y meurt en 1894, à 65 ans, laissant derrière lui une œuvre d’une ampleur scientifique et artistique exceptionnelle.
Conçu pour être publié sous le titre Systemia Entomologiae, le projet n’a connu qu’un premier volume consacré aux libellules, paru à compte d’auteur en 1876. Faute de moyens, Buchecker ne parviendra jamais à faire paraître les six tomes suivants. Après sa mort, sa veuve revend les dessins au musée de Strasbourg pour une somme dérisoire ; ils constituent aujourd’hui un ensemble unique des collections du Musée zoologique de Strasbourg, précieux notamment pour l’étude d’espèces disparues.
Plus d’un siècle et demi plus tard, les Éditions des Musées de Strasbourg rendent hommage à cette entreprise scientifique et artistique en publiant une sélection des planches consacrées aux différents ordres d’insectes. Au-delà de leur beauté graphique, ces dessins témoignent de l’ambition universaliste du XIXᵉ siècle, d’une curiosité sans hiérarchie entre art et science, et d’une vie entière vouée à l’inventaire du vivant.